Depuis plus d’une décennie, je m’intéresse de plus près aux réalités de l’économie québécoise. Ma synthèse est la suivante : Le Québec fait face aux mêmes défis économiques : une dépendance marquée aux importations, un investissement industriel insuffisant et une vulnérabilité accrue face aux fluctuations du commerce international. Je lisais récemment une étude de 2017 de Deloitte et E&B Data, qui vraisemblablement découlait d’une importante baisse de valeur du dollar canadien. Cette étude mettait déjà en évidence le fait que près de 9 milliards de dollars en biens manufacturés importés auraient pu être produits localement. L’idée était alors de relocaliser une partie des chaînes d’approvisionnement afin de favoriser la création d’emplois, de dynamiser l’économie et de réduire les risques liés aux aléas du commerce mondial.
3 ans plus tard, la pandémie de COVID-19 a violemment exposé la fragilité du système. La dépendance critique aux importations est devenue une évidence, notamment dans des secteurs stratégiques comme les équipements médicaux, les semi-conducteurs et l’agroalimentaire. L’image de la pénurie de masques et de respirateurs reste gravée dans les mémoires, illustrant l’incapacité du Québec à produire localement des biens essentiels en période de crise. À ce moment-là, le discours politique s’est intensifié et la relocalisation industrielle a été présentée non plus comme un choix économique, mais comme une nécessité stratégique.
Aujourd’hui, une nouvelle menace pèse sur l’économie québécoise avec l’augmentation des tarifs douaniers imposés par les États-Unis sur plusieurs produits clés. Cette situation affaiblit encore davantage les industries locales et force de nombreuses entreprises à revoir leurs chaînes d’approvisionnement ainsi que leur compétitivité sur les marchés internationaux. Pourtant, si les solutions sont déjà bien connues, leur mise en œuvre reste pourtant incomplète.
Si le Québec peine à concrétiser ce virage économique pourtant crucial, c’est sans doute en grande partie à cause d’une série d’obstacles persistants. On peut penser au manque d’investissement, tant privé que public, qui freine l’adoption des nouvelles technologies et la modernisation des équipements. Malgré les incitatifs disponibles, les entreprises hésitent encore à transformer leurs processus, conscientes des coûts élevés et des risques associés à de tels changements. D’autre part, la complexité réglementaire et la lourdeur administrative ralentissent chaque initiative. La pénurie de main-d’œuvre représente sans doute un autre défi de taille. À cela s’ajoute la question du coût de production. Face aux bas salaires et aux économies d’échelle dont bénéficient certains pays asiatiques, il devient difficile pour plusieurs manufacturiers québécois de concurrencer les produits étrangers, à moins d’un soutien structuré et durable de l’État.
Cela dit, il est devenu évident que le Québec ne peut plus se permettre d’attendre. Depuis que je suis entrepreneure, les 3 crises successives dont j’ai été exposées démontrent la fragilité du modèle économique actuel. Les crises s’enchaînent, les cycles économiques évoluent, les marchés se redéfinissent. À chaque fois, le même constat revient : le Québec doit renforcer son autonomie industrielle pour garantir sa prospérité future. Ce virage n’est plus une option, c’est une nécessité.
Et pour que cette transition soit réussie, les municipalités peuvent également jouer un rôle actif en créant un environnement propice à la transformation économique. Comment? Voici quelques exemples de pour stimuler la créativité : Connaitre les besoins réels des entreprises, aider à l’identification de sources d’approvisionnement alternatives, faciliter la mise en commun de fournisseurs, développer la synergie industrielle et l’économique circulaire, créer des alliances stratégiques pour la logistique, etc.
Et si on profitait de ce contexte provocateur pour magnifier les opportunités latentes de nos territoires?
Retrouver Geneviève Poulin au Forum printanier, elle interviendra pour discuter de la réinvention du leadership pour une prospérité durable.